Une nouvelle avenue est dorénavant à considérer à la suite d’une décision de la CNESST.
L’entrée en vigueur graduelle de la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail (LMRSST) s’est poursuivie le 6 avril 2023 avec la sixième phase de son déploiement. Les modifications concernent plus précisément le chapitre XI de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP), soit la compétence de la CNESST, ainsi que la révision et les recours devant le Tribunal administratif du travail (TAT).
Quels sont les principaux changements
Il y a essentiellement trois nouveautés à connaître : le choix du recours, les délais selon les recours et les nouvelles dispositions.
Le choix du recours
Dans un premier temps, il y a une bonne nouvelle! En effet, une partie en désaccord avec une décision de la CNESST peut, à son choix, selon l’article 360 de la LATMP :
- En demander la révision auprès de la CNESST, comme cela était le cas.
- La contester directement devant le Tribunal administratif du travail.
Le délai selon les recours et les nouvelles dispositions
1er choix : la demande de révision d’une décision de la CNESST
Une personne qui choisit d’effectuer une demande de révision d’une décision de la CNESST dispose du même délai qu’auparavant, soit 30 jours suivant sa notification. Cependant, des exigences s’ajoutent à ce palier. Les voici :
- La CNESST doit dorénavant répondre à une demande de révision sous 90 jours. Il s’agit d’un ajout à l’article 359 (alinéa 3) de la LATMP : « Lorsque la personne qui a demandé la révision a requis un délai pour présenter ses observations ou produire des documents, le délai de 90 jours court à partir de cette présentation ou de cette production. Si la Commission n’a pas disposé de la demande de révision dans les 90 jours, la personne peut contester devant le Tribunal administratif du travail. »
- De plus, l’élément suivant s’est ajouté au sixième alinéa de ce même article : « Lorsqu’une décision qui fait l’objet d’une demande de révision est également contestée devant le Tribunal, ce dernier, défère l’affaire à la Commission pour qu’elle dispose en révision. »
Dans la politique 6.02 de la CNESST (en page 2), il est précisé que « si une décision de la CNESST fait l’objet d’une demande de révision par les deux parties, et qu’une partie désire se prévaloir de son droit de contester devant le Tribunal administratif du travail à l’expiration du délai de 90 jours, elle doit s’assurer que l’autre partie désire également contester au même moment, car le Tribunal administratif du travail doit déférer l’affaire à la CNESST tant qu’il y aura une révision en cours dans le même dossier ».
Notez que la Direction générale de la révision administrative de la CNESST n’a pas attendu la mise en vigueur de ces articles pour transmettre de nouvelles directives aux réviseurs afin d’accélérer les prises de décision. Retenez également que toute décision de la Direction générale de la révision administrative peut être contestable dans les 60 jours auprès du TAT. Voyez le résumé des étapes selon les recours à la Figure 1, ci-après.
2e choix : contestation d’une décision de la CNESST directement au Tribunal administratif du travail
Si la personne choisit plutôt de contester une décision de la CNESST directement au Tribunal administratif du travail, le délai est maintenant de 60 jours à compter de sa notification, dans les cas suivants :
- « Lorsque la décision porte sur un sujet visé aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l’article 212 à la suite d’un avis rendu par le Bureau d’évaluation médicale (BEM), au troisième alinéa de l’article 230 à la suite d’un avis rendu par un comité spécial (des maladies professionnelles pulmonaires (CMPP) ou au troisième alinéa de l’article 233.5 à la suite d’un rapport produit par un comité des maladies professionnelles oncologiques (CMPO). »
Il s’agit de questions d’ordre médical, tel un avis du BEM sur la date de consolidation de la lésion professionnelle. La décision de la CNESST qui entérine l’avis du BEM est maintenant contestable directement au TAT dans les 60 jours. - « Dans les cas visés au paragraphe 1° du premier alinéa, la Commission ou le Tribunal peut, le cas échéant, décider de toute question faisant l’objet de la décision¹. »
Cela inclut les décisions d’ordre administratif. En effet, à la suite de cet avis du BEM, la CNESST peut aussi rendre une décision administrative, telle une décision quant à la fin des indemnités de remplacement du revenu (IRR) et à la date à laquelle un travailleur sera capable d’exercer son emploi. S’il y a lieu, cette nouvelle décision administrative est également contestable au TAT dans un délai de 60 jours à partir de sa notification. - « Lorsque la décision est rendue en vertu des chapitres IX ou X. »
Il s’agit de questions relatives au financement (chapitre IX). Par exemple, la contestation d’une décision de la CNESST sur la classification ou une demande de partage de coûts. Le chapitre X concerne les employeurs tenus personnellement au paiement des prestations.
Également, une décision de la CNESST concernant toute plainte soumise en vertu de l’article 32 peut être contestée dans les 60 jours au TAT (art. 359.1, LATMP).
Article 365 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles
Je profite de l’occasion pour vous rappeler l’existence d’un autre recours possible, soit la demande de reconsidération administrative, présente à l’article 365 de la LATMP. Le texte a été harmonisé pour tenir compte des nouvelles modifications de contestation mentionnées précédemment.
Le voici, pour information : « Le délai pour demander à la CNESST de reconsidérer sa décision, pour corriger toute erreur est de 90 jours, si celle-ci n’a pas fait l’objet d’une décision rendue en vertu de l’article 358.3 ou, dans les cas visés au premier alinéa de l’article 360 LATMP, si elle n’a pas été contestée devant le Tribunal administratif du travail. »
Voilà l’essentiel des modifications à connaître. Il est certainement intéressant de pouvoir acheminer une contestation de la CNESST directement au TAT et de bénéficier d’un plus long délai de contestation. Le Tribunal a prévu qu’avec ces modifications il y aura un volume plus élevé de contestations. Il a d’ailleurs annoncé le 24 janvier dernier des changements dans le traitement des dossiers. Je vous suggère à cet effet de consulter leur site Web.
NOTE
1. La partie en gras a été ajoutée par moi-même.

Francine Gauvin • Conseillère et formatrice en SST
Francine Gauvin a développé une expertise dans les différents systèmes de gestion de la SST portant sur la réclamation et les suivis d’accident. Elle donne notamment les formations Calcul de l’indemnité pour les « 14 premiers jours », Procédures de réclamations et Comprendre et gérer le volet médical en SST. Francine Gauvin détient un baccalauréat en relations industrielles de l’Université Laval et un certificat en santé et sécurité du travail de l’Université de Montréal.